lundi 24 mars 2008

Diagana, les cailloux et la Cathédrale




Au hasard de mes lectures, j’ai essayé de décrypter les propos de M. Diagana, Président de la Ligue Nationale d’Athlétisme et de comprendre quelle était sa vision pour ce sport. En fait, une démarche d’explorateur. J’ai eu du mal à savoir exactement quelle était son ambition. J’ai bien compris que la LNA procurera un statut sécurisant à plus d’une vingtaine d’athlètes de haut niveau en leur apportant un contrat de travail, une couverture sociale et la possibilité de cotiser pour leur retraite. Dont acte. C’est tout à fait formidable pour ces sportifs mais est-ce suffisant pour donner du souffle, de la perspective et un bel avenir à l’athlétisme ?

Ca m’a fait penser à cette belle fable racontée par l’écrivain et poète Charles Péguy. Nous sommes au XIIe siècle, un homme rencontré sur le bord de la route allant vers Chartres est en train de casser des cailloux. On lui demande ce qu’il fait : « Je fais un métier stupide et douloureux ». Un peu plus loin même situation. Même question. Réponse du 2e homme, avec un certain contentement : « Je bâtis une cathédrale qui permettra aux croyants d’élever leur âme ». Conclusion : « Quand on a une cathédrale dans la tête, on ne casse pas les cailloux de la même façon ». Question posée par le psychanalyste Boris Cyrulnik : « Pourquoi certains ont-ils une cathédrale dans la tête, là où d’autres ne voient que des cailloux ? »

Pour dire les choses autrement, j’essaie d’être attentif mais je ne parviens pas à percevoir cette ambition supérieure que l’on appelle « vision » et qui accompagne toutes les grandes réalisations. Qu’est-ce qui sous tend cette volonté de contribuer à la mise en place du circuit Lagardère Athlé Tour, de verser un salaire mensuel de 1 500€ aux athlètes et de leur permettre de préparer leur retraite ? Aujourd’hui, je ne suis pas capable de le dire. Comme l’indique M. Diagana dans un entretien au magazine l’Entreprise (février 2007) expliquant les points communs entre l’entreprise et le sport de haut niveau : «On retrouve le côté seul contre tous, l’aptitude à voir le chemin là ou les autres ne distinguent rien. » C’est justement ce fameux « chemin », appelé aussi « cathédrale » qui est flou, qui devrait « transpirer » dans toutes les interventions du Président de la LNA. C’est le minimum que l’on puisse attendre d’un « boss ». Une aspiration galvanisante qui décuple les énergies, la créativité, l’adhésion et l’engagement. Nike souhaite « le dépassement de nos propres frontières », la FNAC veut « mettre la culture à la portée de tous », Darty met l’accent sur « la confiance », Google veut rendre « les informations accessibles et utiles à tous à travers le monde », Ikea a l’ambition « d’améliorer le quotidien du plus grand nombre ». Qui parle de chaussures de sport, de MP3, de sèches linge, de critères de recherche ou de chaises de cuisine ? Et l’Athlé où veut-il nous conduire ? De quoi nous parle-t-il ? Quelle histoire veut-il nous raconter ? Quel voyage va-t-il nous proposer ?

Comment suivre un Général qui compte les boutons de guêtre ? Comment partir à l’abordage derrière un « Responsable du Personnel », même si son travail administratif est indispensable ? M. Diagana faites nous rêver, transportez-nous vers de nouveaux horizons, dessinez de nouvelles perspectives, faites briller des étoiles dans les yeux des enfants, ouvrez les portes et les fenêtres, prenez de la hauteur…et, c’est promis, nous tenterons, ensuite, de nous enthousiasmer pour les nouveaux points de retraite de M. Pognon ou Mme Arron !

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